09/11/2010
Les dédicaces (2)
La seconde plus désastreuse eut lieu dans un petit salon que je ne nommerai pas non plus, mais juste parce que les organisateurs sont adorables et qu’ils n’ont sont pour rien.
Il n’y avait pas un chat – enfin, sauf Griffe d’encre. J’ai ma petite table dans un angle au fond de la salle, à côté du micro. Ma pile de Pucelles, avec laquelle je fais des tours, des châteaux forts, des éventails… J’ai mon stylo décapuchonné, prêt à l’action. Et heureusement, j’ai aussi ma chaise, qui sera ma plus fidèle amie pendant toute cette journée à attendre le chaland.
Je ne parlerai pas de désastre, cette fois, parce que j’ai rencontré Menolly et que j’étais avec Bénédicte Taffin avec qui on a bien rigolé, et qu’une des employées du libraire est venue me voir en me disant des choses absolument divinement gentilles sur mon roman. Mais de client, point. Des gens –peu nombreux– passant devant mes bouquins, totalement insensibles à mon sourire tendu. Que dois-je faire ? Leur dire Bonjour ? Rester assis ou me mettre debout ? Décontracté ? Sérieux ? Et si je faisais semblant de téléphoner sur mon portable, est-ce qu’ils auraient moins peur de s’approcher ?
Les gens jettent parfois un regard sur la 4ème de couverture, ou sur moi (pas souvent). Il y a moins de clients que d’auteurs. Un gamin de 4 ans vient jouer sous ma table. C’est avec cet inconnu-là que j’aurais mes échanges intellectuels les plus intenses. Je repars avec l’impression d’avoir volé le libraire qui avait acheté 20 exemplaires et qui repart avec 18 (j’en ai dédicacé 1 à Menolly et l’autre à l’employée en question)
Le salon suivant, celui de Villepreux, m’a appris davantage sur les techniques d’alpagage du client.
C’est un salon de littérature générale assez coté. Les auteurs sont publiés par Albin Michel, Mercure de France, Grasset, enfin, ce genre de noms qu’on ne voit pas dans les rayons SFFF. Ma voisine de table est charmante, on rigole beaucoup, elle a un nom un peu connu, une cinquantaine d’année et une dizaine de romans derrière elle publiés dans de grandes maisons.
Je l’observe : elle dit bonjour (je note) quand elle voit des gens de sa génération, elle sort ses romans jeunesse et donne l’âge quelque cela peut être lu (je note) elle commente la couverture (ouais ouais !) elle raconte en quelques mots l’intrigue du livre (Waouh). Mais à la fin, elle ne vend rien du tout, et moi, je ne vends qu’à des gens qui achètent « pour leurs enfants ». Ils me demandent « c’est à partir de quel âge ? », question que je trouve tellement pertinente, moi aussi, que j’ai du mal à leur répondre. « Euh, c’est pour adulte, en fait. Mais ce sera sûrement très bien pour vos enfants. »
Je meure de honte quand, après avoir bafouillé, hésité, bégayé pendant dix minutes devant un monsieur pour lui expliquer de quoi ça parlait, il me répond avec un grand sourire embarrassé « euh, alors bonne chance ! »
Il n’y a presque personne à Villepreux. Ce n’est pas de chance : on est en plein grève des transports et c’est la pénurie de carburant. J’en vends trois (on progresse, me direz-vous).
23:35 Publié dans Beorn dans le monde magique de l'édition | Lien permanent | Commentaires (7)